Méditations
Lors de nos Comités, Assemblées ou rencontres, nous aimons prendre quelques instants pour nous imprégner d'un texte, d'une réflexion inspirante. Retrouvez ci-dessous quelques-unes de nos méditations.

méditation proposée par catherine jobin
Mon âme a un chapeau
Mario de Andrade (San Paolo 1893-1945) Poète, romancier, essayiste et musicologue
–
J'ai compté mes années et j'ai trouvé que j'ai moins de temps à vivre d'ici que ce que j'ai vécu jusqu'à maintenant. Je me sens comme cet enfant qui a gagné un paquet de bonbons: les premiers les mangent avec plaisir, mais quand il s'est rendu compte qu'il en restait peu, il a commencé à les goûter intensément.
Je n'ai plus de temps pour des réunions interminables où les statuts, les règles, les procédures et les règlements internes sont discutés, sachant que rien ne sera fait. Je n'ai plus le temps de soutenir des gens absurdes qui, malgré leur âge chronologique, n'ont pas grandi. Mon temps est trop court: je veux l'essence, mon âme est pressée. Je n'ai plus beaucoup de bonbons dans le paquet.
Je veux vivre à côté d'humains, de gens très humains qui savent rire de leurs erreurs et qui ne sont pas gonflés par leurs propres triomphes et qui prennent leurs responsabilités pour eux-mêmes. De cette manière, la dignité humaine est défendue et l'on vit dans la vérité et dans l'honnêteté. C'est l'essentiel qui rend la vie utile. Je veux m'entourer de gens qui savent toucher les cœurs, de ceux à qui les durs coups de la vie ont appris à grandir avec de douces touches de l'âme.
Oui, je suis pressé, je suis pressé de vivre avec l'intensité que seule la maturité peut donner. Je n'ai pas l'intention de gaspiller aucun des desserts restants. Je suis sûr qu'ils seront exquis, beaucoup plus que ceux mangés jusqu'ici. Mon but est d'atteindre la fin satisfait et en paix avec mes proches et ma conscience.
Nous avons deux vies et la seconde commence quand vous réalisez que vous n'en avez qu'une.

méditation proposée par catherine jobin
De la terre au visage
Frédy Thévoz, issu de la revue "Itinéraires" n° 126
–
L'épicéa de résonance, un Combier séculaire, dont les cimes harponnent le ciel. Un arbre aussi rare que précieux, un sur dix mille épicéas, parti haut chercher la lumière, à la croissance ralentie par de longs hivers, afin de lui donner les cernes serrés, à la force légère.
Après de longues années de séchage, le luthier patient et le guitarier en amour de ce bois au son fidèle perpétuent l'art de Guarneri et Stradivarius. Des fibres ligneuses, issues du sol et des bois du Risoux, ils vont créer des tables d'harmonie. Nous y sommes, une vie, à la fois autre et proche, commence pour l'épicéa de résonance. Et quelle vie ! D'harmonie, de musique et de vibrations, intimes, chaudes et rondes pour nous parler un langage universel, celui du Vivant.
Tout est en place, la forêt vitale contient déjà les harmonies et leurs mélodies, de ses racines profondes jusqu'au Ciel, la poésie devient instrument de l'invisible sève d'hiver. Dans "une rosée de lumière", d'étranges bourgeons vont éclore aux branches mortes de nos existences. A l'image de l'épicéa, commence alors une Vie nouvelle, plus vraie que le réel..
Après de longues années de séchage, le luthier patient et le guitarier en amour de ce bois au son fidèle perpétuent l'art de Guarneri et Stradivarius. Des fibres ligneuses, issues du sol et des bois du Risoux, ils vont créer des tables d'harmonie. Nous y sommes, une vie, à la fois autre et proche, commence pour l'épicéa de résonance. Et quelle vie ! D'harmonie, de musique et de vibrations, intimes, chaudes et rondes pour nous parler un langage universel, celui du Vivant.
Tout est en place, la forêt vitale contient déjà les harmonies et leurs mélodies, de ses racines profondes jusqu'au Ciel, la poésie devient instrument de l'invisible sève d'hiver. Dans "une rosée de lumière", d'étranges bourgeons vont éclore aux branches mortes de nos existences. A l'image de l'épicéa, commence alors une Vie nouvelle, plus vraie que le réel..

méditation proposée par françoise ruffieux
Le tissu de chaque jour
Jean Vernette et Claire Moncelon, issu des Paraboles du bonheur
–
Notre vie est comme un tissu qui s’élabore,
un tissu dont je ne sais pas ce qu’il sera
mais qui, autour de nous peu à peu,
se tisse sans modèle ni dessin savant.
Dans ce tissu, je peux être un fil, un trait de couleur…
bleu profond ? rouge éclatant ? ou bien le fil de lin gris.
Cette troisième couleur, au dire des tisserands, est la plus
importante, le gris neutre de tous les jours,
celui qui fait chanter le bleu profond et le rouge éclatant ;
celui qui est porteur d’harmonie.
N’avoir que ma propre couleur, et de cela me réjouir,
pour qu’elle apporte la joie et non la rivalité,
comme si moi, bleu, j’étais l’ennemi du vert.
Il y a une place pour tous.
Un fil vient à se rompre : aussitôt le travail s’arrête, et les
mais patientes de tous les tisserands s’appliquent à le renouer.
Chaque fil, même le plus lumineux, peut disparaître, tissé sous
les autres. Il est cependant là, non loin, même si notre œil ne le
perçoit plus…
Maintenant c’est au tour du mien d’être lancé à travers la
chaîne. Quand son trait aura cessé d’être visible,
alors toute l’harmonie apparaîtra.
Et le bonheur adviendra.
un tissu dont je ne sais pas ce qu’il sera
mais qui, autour de nous peu à peu,
se tisse sans modèle ni dessin savant.
Dans ce tissu, je peux être un fil, un trait de couleur…
bleu profond ? rouge éclatant ? ou bien le fil de lin gris.
Cette troisième couleur, au dire des tisserands, est la plus
importante, le gris neutre de tous les jours,
celui qui fait chanter le bleu profond et le rouge éclatant ;
celui qui est porteur d’harmonie.
N’avoir que ma propre couleur, et de cela me réjouir,
pour qu’elle apporte la joie et non la rivalité,
comme si moi, bleu, j’étais l’ennemi du vert.
Il y a une place pour tous.
Un fil vient à se rompre : aussitôt le travail s’arrête, et les
mais patientes de tous les tisserands s’appliquent à le renouer.
Chaque fil, même le plus lumineux, peut disparaître, tissé sous
les autres. Il est cependant là, non loin, même si notre œil ne le
perçoit plus…
Maintenant c’est au tour du mien d’être lancé à travers la
chaîne. Quand son trait aura cessé d’être visible,
alors toute l’harmonie apparaîtra.
Et le bonheur adviendra.
(Texte d’un tisserand finlandais)

méditation proposée par catherine jobin
La vie est belle
Etty Hillesum
–
"C'est une expérience
de plus en plus forte chez moi
ces derniers temps:
dans mes actions
et mes sensations quotidiennes
les plus infimes
se glisse un soupçon d'éternité.
de plus en plus forte chez moi
ces derniers temps:
dans mes actions
et mes sensations quotidiennes
les plus infimes
se glisse un soupçon d'éternité.
Je ne suis pas seule à être fatiguée,
malade, triste ou angoissée;
je le suis à l'unisson
de millions d'autres
à travers les siècles,
tout cela c'est la vie;
la vie est belle
et pleine de sens dans son absurdité,
pour peu que l'on sache y ménager
une place pour tout
et la porter toute entière en soi
dans son unité;
alors la vie,
d'une manière ou d'une autre,
forme un ensemble parfait.
malade, triste ou angoissée;
je le suis à l'unisson
de millions d'autres
à travers les siècles,
tout cela c'est la vie;
la vie est belle
et pleine de sens dans son absurdité,
pour peu que l'on sache y ménager
une place pour tout
et la porter toute entière en soi
dans son unité;
alors la vie,
d'une manière ou d'une autre,
forme un ensemble parfait.
Dès qu'on refuse
ou veut éliminer certains éléments,
dès que l'on suit son bon plaisir
et son caprice pour admettre
tel aspect de la vie
et en rejeter tel autre,
alors la vie devient en effet absurde;
dès lors que l'ensemble est perdu,
tout devient arbitraire."
ou veut éliminer certains éléments,
dès que l'on suit son bon plaisir
et son caprice pour admettre
tel aspect de la vie
et en rejeter tel autre,
alors la vie devient en effet absurde;
dès lors que l'ensemble est perdu,
tout devient arbitraire."

méditation proposée par catherine jobin
Ils sont toujours vivants
Martin Gray
–
Je n’ai qu’une certitude :
Ceux que j’ai aimés, ma famille, mes camarades, mes enfants,
Demeurent vivants en moi.
Ils guident encore mes pas.
Être fidèle à ceux qui sont morts,
C’est vivre comme ils auraient vécu, c’est les faire vivre en nous,
C’est transmettre leur visage, leur voix, leur message aux autres.
Ainsi la vie des disparus germe sans fin.
Je ne sais pas si je dois me dire croyant.
Je ne puis dire : je crois en Dieu.
Je ne puis dire non plus : je crois…
Ce que je sais seulement,
C’est que la mort ne détruit pas l’amour que l'on portait
A ceux qui ne sont plus…
Je le sais parce que tous les jours je vis avec les miens…
Ce que je sais aussi, c’est que la vie doit avoir un sens.
Ce que je sais encore, c’est que l’amour est la clé de l’existence.
Ce que je sais enfin, c’est que l’amour, le bien, la fidélité et l’espoir
Triomphent finalement toujours du mal, de la mort et de la barbarie.
Ceux que j’ai aimés, ma famille, mes camarades, mes enfants,
Demeurent vivants en moi.
Ils guident encore mes pas.
Leur être fidèle, ce n’est pas s’enfermer dans la douleur.
Il faut continuer de creuser le sillon : droit et profond.
Comme ils l’auraient fait eux-mêmes.
Comme on l’aurait fait avec eux, pour eux.
Il faut continuer de creuser le sillon : droit et profond.
Comme ils l’auraient fait eux-mêmes.
Comme on l’aurait fait avec eux, pour eux.
Être fidèle à ceux qui sont morts,
C’est vivre comme ils auraient vécu, c’est les faire vivre en nous,
C’est transmettre leur visage, leur voix, leur message aux autres.
Ainsi la vie des disparus germe sans fin.
Je ne sais pas si je dois me dire croyant.
Je ne puis dire : je crois en Dieu.
Je ne puis dire non plus : je crois…
Ce que je sais seulement,
C’est que la mort ne détruit pas l’amour que l'on portait
A ceux qui ne sont plus…
Je le sais parce que tous les jours je vis avec les miens…
Ce que je sais aussi, c’est que la vie doit avoir un sens.
Ce que je sais encore, c’est que l’amour est la clé de l’existence.
Ce que je sais enfin, c’est que l’amour, le bien, la fidélité et l’espoir
Triomphent finalement toujours du mal, de la mort et de la barbarie.
Tout cela, je la sais, je le crois…
Dieu est-il au creux de ces certitudes ?
Je ne sais pas… Je cherche…

méditation proposée par françoise ruffieux
Partir
Jean Debruynne (1925-2006)
–
Si je vais partir, c'est que je suis déjà parti.
Dès l'instant où j'ai pu m'arracher à moi-même,
cette décision de partir, mon départ a déjà eu lieu.
Le plus dur n'est pas de partir, mais de le vouloir.
Toutes les raisons sont bonnes
pour ne pas partir :
le coeur a ses habitudes, l'âme ses tranquillités,
le corps ses fatigues, les yeux leur horizon
et le visage son cercle.
Il n'existe donc pas de départ sans séparation.
Le départ est donc toujours un acte créateur.
Il rend possible. Il ouvre un espace.
Accepter de partir, c'est accepter qu'il soit un avenir,
c'est reconnaître que tout n'a pas été dit.
C'est affirmer que notre monde
n'est pas notre prison,
et que notre temps n'est pas sans issue.
Dès l'instant où j'ai pu m'arracher à moi-même,
cette décision de partir, mon départ a déjà eu lieu.
Le plus dur n'est pas de partir, mais de le vouloir.
Toutes les raisons sont bonnes
pour ne pas partir :
le coeur a ses habitudes, l'âme ses tranquillités,
le corps ses fatigues, les yeux leur horizon
et le visage son cercle.
Il n'existe donc pas de départ sans séparation.
Le départ est donc toujours un acte créateur.
Il rend possible. Il ouvre un espace.
Accepter de partir, c'est accepter qu'il soit un avenir,
c'est reconnaître que tout n'a pas été dit.
C'est affirmer que notre monde
n'est pas notre prison,
et que notre temps n'est pas sans issue.

méditation proposée par françoise ruffieux
Le seul critère
Maurice Zundel
–
"Nous garderons ce critère de la présence divine, le seul critère :
Quand on est libre, quand on ne se regarde plus,
quand on ne tourne plus autour de soi,
quand on ne veut contraindre ni soi ni personne,
quand on est un espace où la vie respire en soi et autour de soi.
Quand le monde est plus beau, alors c’est que Dieu est là, c’est qu’il est en train de passer,
c’est que toute chose retourne à son origine et se met à chanter. "